Dictionnaire mental

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« Cherchant à comprendre comment s’organise le lexique mental, les psychologues ont recours à plusieurs méthodes. L’une des plus courantes est la technique de l’amorçage. On sensibilise une personne en lui présentant un mot : par exemple « hôpital ». C’est l’amorce. Puis, on lui montre une série d’autres mots (« métropolitain », « chapeau », « tendre », « tsunami »…) en lui demandant d’appuyer sur un bouton dès qu’il a identifié chacun d’eux.

On a découvert ainsi que certains mots sont détectés plus rapidement lorsqu’ils sont précédés par une amorce relevant du même domaine sémantique. Par exemple, on reconnaît plus vite le mot « infirmière » placé après « hôpital » que placé après « sardine ».

Ces expériences ont conduit à penser que dans le lexique mental, les mots sont plus proches par leur sens que par leur son. Par exemple la séquence « huile-vinaigre » se reconnaît plus facilement que la séquence « huile-tuile », alors que ces derniers mots sont pourtant plus ressemblants.

Plus exactement, les chercheurs ont démontré que l’accès au lexique s’effectuait par deux voies parallèles : un accès sémantique (par le sens) et un accès phonologique (par le son). Le sens aurait tout de même priorité sur le son.

On aimerait pouvoir, par cette méthode, organiser le champ du lexique en grandes zones selon leur proximité sémantique. On pourrait supposer que les mots ayant un sens voisin (petit, minuscule, bas…) soient associés étroitement entre eux dans le lexique mental.

Or, de nombreuses expériences montrent au contraire que les couples d’opposition (petit/grand, noir/ blanc, jour/nuit…) sont beaucoup plus proches, c’est-à-dire qu’ils renvoient plus facilement l’un à l’autre dans les exercices d’amorçage.

Autre phénomène mis au jour par les psychologues : un mot se propage au mot voisin selon d’autres critères que la proximité sémantique, l’affect. Des expériences d’amorçage montrent que le mot « soleil » est plus facilement amorcé par « amour » que par « rond » ou « jaune » ou « lumière », mots dont il est sémantiquement plus proche.

Il existerait donc, selon Ludovic Ferrand et ses collaborateurs, des liaisons affectives spécifiques, différentes des liaisons sémantiques. »

In Le cerveau et la pensée. Jean François Dortier.